Aujourd’hui nous allons marcher ensemble la dernière partie de mon GR5 . Traverser le magnifique Mercantour, la dernière partie du GR avant d’arriver au bord de la Mer méditerranée, à Nice. C’est la troisième et dernière partie de notre voyage sur mon GR5 en 20 jours. Si ce n’est pas fait, je t’invite à lire le début de l’histoire avant en cliquant sur ces liens :
- Partie 1 / 3 : https://lebanquierrandonneur.fr/gr5-les-alpes-en-20-jours-partie-1/
- Partie 2 / 3 : https://lebanquierrandonneur.fr/gr5-les-alpes-en-20-jours-partie-2/
J16 : MalleMort – Saint Étienne
Allez, c’est parti pour la dernière partie de notre périple alpin. Après une nuit inoubliable au bien nommé col de MalleMort… je pli le campement tôt le matin et redescend sur Larche. Tellement tôt que tout y est fermé. Dommage. Larche est l’un des 10 points de ravitaillements (hors refuge, donc en petite ou moyenne surfaces) que je me suis noté en préparant mon GR10. Et le prochain que je me suis référencé est à Nice…
Ce que j’aime aussi en randonnée, c’est qu’il n’y a pas 36 questions à se poser. Boire, manger, dormir, marcher. Et c’est tout. Tout le reste devient tellement superflu, que l’on y pense même plus le temps d’une marche. Cependant, ces quatre points essentiels sont tellement essentiels… que sans eux on ne vit pas. Et là, mon sac commence à être très léger, ce qui veut dire que les réserves de nourritures le sont aussi.
Donc le choix qui s’offre à moi est le suivant : attendre à Larche ou trouver une solution ravitaillement avant Nice. Attendre sans rien faire… de 5h du matin à l’ouverture d’un commerce à 8 ou 9 heures… trop dur pour moi. Alors un petit coup de Google Map, et je m’assure de trouver quelque chose avant que mon ventre ne soit vide.
De Larche, le GR5 reprends son cours en remontant l’Ubayette, dont la vallée oblique droit vers le sud. Il se faufile entre les lacs du Lauzanier et celui de derrière la Croix, et c’est parti pour l’ascension du Pas de la Cavale, à 2671 mètres d’altitude. Wahoo, c’est magnifique…
Ensuite, on passe le col des Fourches, bien gardé par ses blockhaus de Maginot, et on redescend vers un autre ouvrage militaire surprenant. C’est le Camp des Fourches. Construit juste avant la première guerre mondiale, il pouvait abrité un bataillon entier de chasseurs alpins. Aujourd’hui il est vide, en ruine, mais l’ambiance qui y règne est sympa, rien à voir avec mon expérience glaçante de la Mallemort…
En plus aujourd’hui il fait un grand ciel bleu, et je croise et recroise deux randonneurs sympa, un hollandais et une américaine, encore une belle rencontre des sentiers. Eux s’arrête au refuge de Bousiéyas, moi je continue mon chemin après un petit ravito, franchi le col de la Colombière à 2237 mètres et redescends gentiment de l’autre côté.
J17 : Saint Étienne – Col des Moulinés
Là on descend bas, bien bas. En arrivant au fonds de la vallée du Tinée nous sommes à environ 1100m. Et cela me fait un frôle d’effet. D’abord parce que ça fait quelques jours que je ne suis pas descendu aussi bas en altitude. Ensuite, parce qu’il fait chaud. En montagne, on dit que l’on perd 1°C par 100 mètres d’altitude. Et enfin… la vallée du Tinée se jette dans la méditerranée, à quelques dizaines de kilomètres plus au Sud. La méditerranée, c’est là ou je vais, mais ça veut dire aussi que l’aventure du GR5 est bientôt terminée.
La fin du GR5 approche à grand pas, et à chaque fois que je m’en rends compte pendant un périple… ça me touche, ça m’émeut. Cette sensation me tombe généralement dessus plusieurs jours à l’avance, avant d’arriver sur la « ligne d’arrivée ».
C’est un drôle de cocktail. D’un côté, la joie et la satisfaction personnelle d’avoir réussi à accomplir quelque chose. De l’autre, une petite voix qui dit : « c’est déjà fini ? »… Dommage, on était bien là… ça me rappelle la citation d’un grand alpiniste français qui disait : « Le courage, ce n’est pas de monter là-haut. Le courage… c’est de redescendre dans ce monde de fou ».
Enfin bon, ce n’est pas tout à fait fini quand même, revenons-en à notre GR5 Alpin ! On remonte sur la montagne en passant par Auron, puis on effleure de près le Mont Mounier, en passant par la stèle Vallette, un officier chasseur alpin décédé ici lors d’une reconnaissance à ski.
J’ai la chance d’être là un jour ensoleillé, avec un parfait ciel bleu, et c’est vraiment magnifique. Cet endroit est dans mon cœur le plus beau spot du Mercantour ! Vraiment Magnifique. Perché là-haut, on voit la fin du Massif pierreux du Mont Mounier qui redescend en pente douce jusqu’au Col des Moulinés. Pas de végétation, juste de la caillasse grise partout. Autours, on voit les vallées boisées encaissées. Vers le sud, des montagnes, toutes plus petites. Et là-bas au loin… Une grande masse grise qui barre l’horizon : de l’humidité… la méditerranée !
Je redescend du Mont dans ce décor fantastique, et j’ai vraiment l’impression d’être dans un autre monde. Une fois redescendu de Col des Moulinés, je trouve un endroit pour planter le bivouac. Bon… il n’y en a pas trente-six aux alentours, donc il ne faut pas être trop difficile pour le dévers de la tente. L’avantage, quand on a marché 30 kilomètres et 2000 mètres de D+ dans sa journée… c’est que même si la tente est un petit peu de travers on dors très bien !
D’ailleurs je conte ce récit de GR5 comme si c’était une promenade de santé. Qu’il n’y ait pas de quiproquo entre nous, faire un GR5 en 18 étapes, sans se blesser et en prenant son pied ça se prépare ! On parle de 32,5 km par jour, 1666 mètres de D+ et autant de D-. Pour être capable de faire une telle performance, j’ai une excellente préparation physique, que je dévoile à 100% dans la Formation GR5 que tu retrouveras ici :
Plus d’infos sur la préparation au GR5 sur ce lien
J18 : Col des Moulinés- Col du Varaire
Après une bonne nuit au bivouac, on redescend à nouveau. Détails amusant du GR5, on redescend à nouveau vers la vallée de la Tinée, que l’on traverse à Saint-Sauveur sur Tinée. C’est dans cette vallée que nous sommes déjà passé hier, mais cette fois-ci on descend à moins de 500 mètres d’altitude, ce qui ne c’est pas produit depuis… Le départ à Thonon-les-Bains !
Puis le GR remonte de l’autre côté de la vallée, on fait une petite étape forestière, ce qui change encore d’ambiance par rapport à ces derniers jours, pour arriver à un point très important : Saint-Dalmas du Plan. C’est dans ce village qu’il va falloir prendre une décision importante pour le randonneur. Soit continuer le GR5 classique jusqu’à Nice. Soit prendre la variante GR52A qui part vers Menton, en passant par la fameuse Vallée des Merveilles.
Ah, la Vallée des Merveilles… tout le monde m’en parle depuis le début de mon GR5 ! Je ne l’a ferai pas cette fois-ci, mais je sais que mon prochain GR5 me fera passer par cette vallée. Je n’en ai entendu que du bien, et l’idée de passer par une magnifique vallée striée de gravures et de peintures pré-historique à chaque détour du chemin me plait.
Je ne regrette tout de même pas de ne pas l’avoir faite, car il me tenait à cœur de faire l’itinéraire « classique » qui débouche sur Nice. Alors je prend au sud, et continue mon chemin en montant vers les Caïres. Il est tard, je plante le bivouac aux alentours du Col du Varaire.
J19 : Col du Varaire – Levens
Levé à l’aube, j’ai une jolie vu sur la suite du programme. Le soleil est en train de se lever à l’Est, pendant que je marche à à peu près 2000m d’altitude pour la dernière fois de ce voyage. Puis le sentier descend dans la forêt, descendant à 1000 mètres jusqu’à Utelle. Puis 200 mètres au Cros d’Utelle, avant de remonter légèrement en allant vers Levens.
Ca monte et ça descend… c’est toujours comme ça les randonnées en montagne. Et lorsque l’on prends un petit peu de recul, en fait, la randonnée c’est comme vie. Il y a une destination, un objectif, un rêve… mais il est tellement loin qu’on ne le voit pas encore. Et pour atteindre ce rêve, quel qu’il soit, il y a des obstacles. Des montagnes.
Alors on surmonte les épreuves de la vie, on y va, et quand on arrive au sommet de la montagne, on voit presque notre rêve au loin… Wahoo… On se dit « ça y est ! J’y suis presque ! » Et puis on redescend. Et là on se rend compte qu’il y a encore une autre montagne, encore une épreuve à surmonter, et encore une autre, etc etc…
Mais plus on franchit de montagne, plus on devine l’objectif se rapprocher à l’horizon… et plus les épreuves de la vie paraissent simple à surmonter.
J20 : Levens – Nice , à midi
Aujourd’hui c’est le grand jour. J’atteins Nice ! Je me réveille tout excité au fonds de ma tente, je pli le campement, et c’est parti pour le dernier jour de ce GR5. Comme près de toute les grandes villes, le nombre de GR, GRP et compagnie s’accroit. Comme à chaque fois que j’arrive près d’une grande ville, ma vigilance redescend… un combo de choc qui fait qu’aujourd’hui encore, je vais prendre un mauvais chemin. Enfin, mauvais… il n’y as pas de mauvais chemin, mais disons qu’à une des nombreuses intersections entre deux GR, je prend à droite au lieu de prendre à gauche.
Ca c’est systématique dans mes randonnées au long cours. Je suis tellement habitué à marcher plusieurs semaines, voire plusieurs mois dans des endroits tellement paumés qu’il n’y a souvent qu’un seul chemin… que le jours où il y a à nouveau des « carrefours de GR » je me désoriente. Je m’en rends compte aux alentours de Colomars, lorsque je vois la vallée du Var d’ouvrir sur ma droite. Je me dis « Tiens, c’est marrant, je ne me souviens pas de ça lors du point topo du matin… »
Hé bien non, je ne risque pas de m’en souvenir, je ne suis pas sensé être là. Je regarde la carte et trouve un itinéraire de substitution, mais quand moins rigolo car il me fera passer par la route. Et ça, ça me pause plusieurs problèmes. Tout d’abord, après un mois en montagne je ne sais plus ce qu’est une route. Un truc dur qui pu sur lequel roule des voitures… des routes… des voitures… ça y est, ça me revient ! Ensuite, les gens des grosses villes roulent d’une certaines façon… disons un peu nerveuse. Enfin, il n’y a pas de trottoir sur les hauteurs de Nice et les environs, alors que les routes sont plutôt sinueuse. Il va falloir être très prudent.
Ha Ha ! V’la l’campagnard !
Alors je redescend des hauteurs de Nice vers la ligne d’arrivée : la promenade des Anglais et la Mer méditerranée qui est là. Je marche sur la route, et là une voiture arrive vite, le gars fait un écart au milieu de la route, sort toute sa tête et la moitié de son buste, me montre du doigt en explosant de rire, en disant : « Ha ha ! V’la l’campagnard » (avec son accent du Sud) tout en klaxonnant…
Je suis mort de rire en écrivant ces lignes, parce que je revis la scène comme si j’y étais ! Mais ce jour-là, ça ne m’a pas fait rire ! Du tout ! Je redescendais de la montagne où j’étais tranquille, au calme. J’appréhendais déjà d’arriver dans une grosse ville… le genre d’endroit où je ne vais plus… et je me fait accueillir comme ça. En plus, mon look n’est pas si « campagnard » que ça, si ?
Nice et la méditerranée
Une fois la ville traversée, j’arrive au bord de la ma mer… Wahoo… je pense à ce moment depuis Thonon-les-Bains… Depuis j’ai traversé toutes les Alpes sur le GR5 en m’offrant un petit Tour du Mont Blanc au passage. Près d’un mois de montagne. Près de 800 km et 40 000 m de D+. Ma dernière douche chaude à MontChauvin, et depuis, des petites douches de bivouac dans les torrents de montagnes, souvent frais.
Et là, elle est devant moi… Je désharnache mon sac, mon camel, j’enlève mes vêtements et saute dans la mer pour m’y plonger totalement, sans pouvoir retenir des gloussements de plaisir ! Mmmmh… elle est trop bonne !
Après ce moment de détente totale, je book mon Ferry : demain… je pars faire mon GR20 en Corse. Mais ça, c’est une autre histoire…